Si vous suivez un peu l’actualité française, vous avez probablement remarqué que des mouvements sociaux, de la contestation et une certaine dose de violence sont en train de se dérouler en Nouvelle-Calédonie, au point que le Président Macron s’est envolé mardi soir pour s’y rendre. Depuis plusieurs jours, la Nouvelle-Calédonie est en proie à une contestation sociale assortie d’un fort degré de violence avec des émeutes, des pillages, de l’insécurité, des blessés et des morts.
J’ai choisi de vous parler de la Nouvelle-Calédonie dans la perspective de vous offrir des clefs historiques et culturelles afin de mieux comprendre les événements actuels, dans leurs grandes lignes. Pour vous qui apprenez le français, il est nécessaire de connaître un peu de l’histoire française depuis son aspect colonial. Vous pourriez tout à fait devoir étudier un document authentique qui évoque la Nouvelle-Calédonie ou encore la Martinique ou l’Île de la Réunion.
Sans devenir un(e) spécialiste des DOM-TOM français (départements d’outre-mer et territoires d’outre-mer), il est tout de même nécessaire, à votre niveau, d’avoir une vue d’ensemble de la question.
Il en est de même pour moi, je ne suis pas du tout historienne, mais je me suis renseignée afin de pouvoir vous livrer cet article et vous aider à mieux comprendre l’actualité française, l’histoire française, les décisions politiques et la culture.
Je vous souhaite une bonne lecture 🙂
Un peu d’histoire de la Nouvelle-Calédonie
La Nouvelle-Calédonie se situe dans l’Océan Pacifque, il s’agit d’un ensemble d’îles situé à plus de 16 000 km de la France métropolitaine (on est relativement proches de l’Australie).
A la fin du 18ème siècle, le navigateur anglais James Cook découvre une terre qu’il baptise New Caledonia. Au tout début du 19ème siècle, des chasseurs à la baleine ainsi que des commerçants commencent à s’y installer, suivis de près par des évangélistes anglais protestants. Les premières conversions qui en résultent ne plaisent pas aux catholiques qui envoient à leur tour des missions d’évangélisation en New Caledonia.
C’est en 1853, sous Napoléon III que la Nouvelle-Calédonie est proclamée territoire français. Trois raisons principales poussent à cette action :
- La France cherche à asseoir sa présence dans le Pacifique.
- Elle cherche également à contrer l’influence d’autres puissances coloniales, dont les Néerlandais et les Anglais.
- Enfin, Napoléon III veut établir une colonie pénitentiaire (une grande prison à ciel ouvert).
En 1860, la Nouvelle-Calédonie devient officiellement une colonie française.
La colonie pénitentiaire
De 1864 à 1897, la France métropolitaine enverra en Nouvelle-Calédonie des condamnés au bagne. Ces bagnards contribueronts à construire l’infrastructure sur place (travaux forcés), et après avoir purgé leur peine de prison, ils devront rester sur l’île tout en étant « libres » pour une durée équivalente au double de leur peine de prison (autant dire qu’ils ne repartaient jamais). Le but de ce doublement de peine était à l’époque de forcer les anciens bagnards à rester sur place et ainsi à peupler la Nouvelle-Calédonie.
Il est à noter que les déportations de prisionniers politiques dureront jusqu’en 1931.
Enfin, à la fin du 19ème siècle, des femmes condamnées en France furent elles aussi envoyées en Nouvelle-Calédonie afin de contribuer au peuplement de l’île en se mariant avec d’anciens bagnards…
Le statut de l’indigénat
C’est en 1887 qu’est officiellement mis en place un statut d’indigénat. Ce statut, présent dans beaucoup de colonies françaises mais variant de l’une à l’autre, spécifie les droits (ou plutôt les absences de droits) de la population kanake. Il fut en vigueur jusqu’à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. L’abandon de l’indigénat permit par exemple aux Kanaks :
- D’être considérés comme des citoyens français (d’avoir la nationalité française)
- D’obtenir le droit de vote, de façon limitée et très progressive puisqu’il fallut attendre 1957 pour que ce droit soit étendu à toute la population kanake.
Une lutte pour l’indépendace
Face à une telle situation, les tensions entre le courant indépendantiste et le courant anti-indépendance augmentent (s’exacerbent), culminant entre les années 1984 et 1988 et se transformant en une quasi guerre civile avec des victimes autant du côté des indépendantistes que des anti-indépendance ou encore des forces de l’ordre. En 1988, un point de violence extrême est atteint avec la prise d’otages de gendarmes qui dura deux semaines dans la grotte d’Ouvéa et se solda par une forte violence et des morts de part et d’autre (dans chacun des camps opposés).
Suite aux « événements » des années 1980, les représentants indépendantistes et ceux en faveur du pouvoir français négocient les « accords de Matignon » mettant en place une transition afin de donner au peuple calédonien l’opportunité de se prononcer sur son indépedance ou non par référendum.
A ce jour, 3 référendums ont eu lieu n’aboutissant pas à un vote majoritaire en faveur de l’indépendance.
Une société à deux vitesses
Suite à ces accords de Matignon, un autre pacte visant le plan sociétal est lui aussi mis en place. Cet accord tend à réduire les inégalités qui perdurent entre Kanaks et Caldoches (les Caldoches sont les Calédoniens d’origine européenne). Plusieurs initiatives sont mises en place, mais il est tout à fait choquant de voir qu’il a fallu attendre 2008 pour avoir deux médecins kanaks et 2016 pour que le premier avocat kanak rejoigne le barreau de Nouméa.
Aujourd’hui encore en 2024 :
- Les Kanaks occupent la majorité des emplois subalternes (emplois moins qualifiés et donc moins rémunérés)
- Le taux de chômage de la population kanake est deux fois plus élevé que celui de la population caldoche
- Plus de Kanaks que de Caldoches vivent sous le seuil de pauvreté.
Le projet de loi qui a mis le feu aux poudres
Suite aux événements de 1988, le « corps électoral » a été « gelé », ce qui signifie que les Français (de métropole) qui n’habitaient pas sur l’île à ce moment, et tous ceux arrivés après 1988, n’ont pas le droit de voter.
Cette année, le gouvernement français a décidé de modifier cette règle en l’assouplissant et en autorisant les Français de métropole résidant en Nouvelle-Calédonie depuis plus de 10 ans à voter. Pour les Kanaks, l’intégration de ces Français signe la fin de leurs espoirs d’indépendance puisque le poids des « non Kanaks » va augmenter dans la proportion d’électeurs.
Le vote de ce texte de loi par l’Assemblée nationale a déclenché une vague de contestation qui a grossi au point de se transformer en émeutes et violences.
Si vous souhaitez aller plus loin sur ce sujet, voici des liens vers des articles traitant différents points de cette question :
Puis un article relatif à l’adoption de ce projet de loi par l’Assemblée nationale.
Pour mieux comprendre le contexte néo-calédonien, un article avec du vocabulaire utile.
Pourquoi est-il important de connaître l’histoire et la culture française quand on apprend la langue française ?
L’actualité brûlante qui se déroule en ce moment en Nouvelle-Calédonie nous montre à quel point il est important, pour un étudiant en langue française, de connaître un peu d’histoire. Il ne s’agit pas de devenir un spécialiste de l’histoire, de la littérature, de la géographie ou de la culture française, mais il est absolument nécessaire quand on étudie le français au niveau perfectionnement d’avoir une connaissance de base, une vue d’ensemble de la culture française.
En effet, avoir ces connaissances de base vous permet de comprendre l’actualité française, vous pouvez lire la presse ou regarder les informations en comprenant de quoi il est question. En outre, si vous passez un examen comme le DELF ou le DALF, vous aurez à lire et/ou écouter des documents authentiques. Ces documents issus des médias français pourraient tout à fait reprendre ces thématiques.
Voilà pourquoi il est important d’avoir une culture générale qui couvre dans les grandes lignes l’histoire, la géographie, la culture de la France. La France n’est pas que la France métropolitaine, la France a un passé colonial qui reste encore très marqué à travers les DOM-TOM. Sans devenir spécialiste de la question, il faut pouvoir la comprendre d’une façon générale.
Pour vous aider à progresser en langue française et en culture française, je vous propose des cours de français niveau perfectionnement qui vous permettent d’approfondir en parallèle vos compétences linguistiques et vos compétences culturelles.
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