Il y a quelques temps de cela, je vous disais que je souhaitais relire certains des ouvrages qui m’ont marquée pendant mes études, parmi lesquels des œuvres que je considère comme fondatrices de la réflexion en interculturel depuis un point de vue sociologique et psychologique.
J’apprécie particulièrement certains des chercheurs connectés à la très célèbre école de Palo Alto. Dans les années 70, ils firent faire des bonds considérables à des domaines comme la communication, en particulier la communication interculturelle qu’elle soit verbale ou non verbale.
Je sais que certains pensent que cette littérature est surannée, mais personnellement, elle me semble toujours d’actualité et absolument incontournable pour toute personne souhaitant évoluer dans le domaine de l’expatriation et de l’interculturel, qu’il s’agisse d’enseignants, de coachs de tout autre professionnel ou des expatriés eux-mêmes. D’autres ouvrages ont été publiés depuis, mais je pense que ces lectures plus « anciennes » et à l’origine de grands bonds dans la pensée interculturelle permettent de comprendre les concepts fondamentaux à leur base, de les comprendre en profondeur, bref de ne pas aller trop vite et de se donner la chance de bien les assimiler.
Voilà pourquoi j’y suis attachée, et pourquoi je vous présente l’un de ces livres aujourd’hui.
Paul Watzlawick, La Réalité de la réalité
Pour commencer ma série de lecture, j’ai jeté mon dévolu sur le passionnant ouvrage de Paul Watzlawick, La Réalité de la réalité.
Avouons que rien que son titre a toute sa place en 2024, bien que cet ouvrage ait été publié en 1976. Ce qui me fascine avec ces lectures, c’est le degré d’analyse que ces chercheurs ont été capables d’avoir tout autant que la simplicité et le pragmatisme avec lesquels ils nous restituent leurs résultats.
Je vous encourage fortement à lire cet ouvrage qui saura nourrir vos connaissances autant que votre réflexion. Vous verrez à quel point il est loin d’être désuet, bien au contraire, vous y trouverez des analyses fascinantes sur la désinformation ou encore les différences de perception de réalité en situation interculturelle. Ces analyses sauront vous apporter des pistes de réflexion fort utiles dans votre enseignement ou votre accompagnement d’expatriés / d’étrangers.
Si vous êtes vous-même expatrié(e), une telle lecture vous dotera d’un outil extrêmement puissant pour mieux comprendre la situation qui vous entoure et prendre du recul afin de bien vivre votre expatriation.
La ponctuation de la réalité
Je vous recommande tout particulièrement le chapitre intitulé « Ponctuation ». Vous y découvrirez des concepts et des expériences éclairants pour toute situation interculturelle.
Selon Watzlawick, la ponctuation (dans le contexte de cet ouvrage) est à entendre comme « le point de vue depuis lequel un texte est déchiffré » (page 67), ou encore l’ordre dans lequel un texte est abordé par chaque protagoniste d’une interaction.
Par texte, il faut entendre ici tout support de communication, tout autant que toute situation de communication, le concept de « texte » étant une métaphore. Et Watzlawick de nous montrer à l’aide d’exemples très concrets à quel point la communication interpersonnelle est compliquée car soumise à des ponctuations différentes, autrement dit des lectures de situations différentes. Et comment, en situation interculturelle, on peut aisément se retrouver embourbé dans des quiproquos dont on ne soupçonne même pas l’existence.
Connaître de tels concepts est tout simplement primordial pour toute personne intéressée par l’interculturel et je vous encourage vivement à aller lire cet ouvrage, qui du reste est d’un abord facile.
La réalité, savez-vous ce que c’est ?
Je vous laisse sur ce conseil de lecture en vous citant quelques passages de l’avant-propos du livre que je trouve absolument fascinants et qui nous donnent le ton de l’ouvrage :
« Ce livre traite du procès par lequel la communication crée ce que nous appelons réalité. […]. Comme ce livre le montrera, notre idée quotidienne, conventionnelle, de la réalité est une illusion que nous passons une partie substantielle de notre vie à étayer, fût-ce au risque considérable de plier les faits à notre propre définition du réel, au lieu d’adopter la démarche inverse. De toutes les illusions, la plus périlleuse consiste à penser qu’il n’existe qu’une seule réalité. En fait ce qui existe, ce ne sont que différentes versions de celle-ci dont certaines peuvent être contradictoires, et qui sont toutes des effets de la communication, non le reflet de vérités objectives et éternelles. »
Je vous laisse méditer sur cette belle citation qui résonne directement avec le nécessaire principe de décentration, crucial pour toute situation intercutlurelle, et je vous retrouve, avec plaisir, très bientôt.